Mordue de navigation, Pauline a intégré l’ENSTA Bretagne pour sa proximité avec le monde maritime et sa filière en architecture navale. « Si je n’avais pas eu l’ENSTA Bretagne, je ne sais vraiment pas ce que j’aurai fait. C’était vraiment mon premier et unique choix ». Aujourd’hui, elle évolue dans le domaine de la propulsion vélique et de la décarbonation du transport maritime tout en menant un projet personnel de course au large en solitaire : la mini-transat.
Quel a été ton parcours en sortie d’école ?
Au terme de ma formation d'ingénieur en architecture navale, j’ai réalisé mon stage de fin d’études de mars à septembre 2019 dans l’entreprise Bénéteau. Mes missions m’ont amené à travailler avec le cabinet d’architecture navale VPLP Design présent dans le domaine de la course au large notamment. Le cabinet m’a proposé un poste et j’ai rejoint l’équipe à Paris. Puis, après le premier confinement, j’ai intégré le bureau nantais (ma ville d’origine) qui s’ouvrait.
Quelles étaient tes missions ?
J’ai travaillé principalement sur le sujet de la décarbonation des navires avec la double casquette architecte navale et ingénieure. Je travaillais sur des méthodes numériques pour modéliser les écoulements sur les bateaux : un class 40, des cargos et rouliers, mais aussi des catamarans de croisière. J’intervenais sur le design, les calculs de stabilité, l’hydrodynamique naval… bref, sur l’ensemble de la boucle navire. Puis, fin 2022, j’ai démissionné.
Pour quelles raisons as-tu choisi de quitter ton entreprise ?
Lors de mon stage de fin d’études, mon tuteur m’avait beaucoup parlé de la mini transat : une course au large en solitaire qu’il avait lui-même réalisé. J’aime beaucoup naviguer et son expérience m’a donné envie de me lancer dans ce projet. J’avais vu que des diplômés d’ENSTA Bretagne l’avait fait, dont Kevin Bloc’h, cela m’a rassuré.
En janvier 2023, j’ai intégré Bureau Veritas Solutions Marine & Offshore. Il s’agit d’un bureau d’études naval. On y fait beaucoup de calculs, de la CFD sur des applications de type cargos et transport de marchandises à la voile. Nous travaillons également sur la décarbonation, mais plutôt sur l’optimisation de la carène des navires et leurs superstructures afin d’optimiser l’écoulement aérodynamique.
Avant de rejoindre l’entreprise, je leur ai présenté mon projet. Ils avaient déjà eu un salarié qui avait vécu cette expérience, donc ça ne les effrayait pas. Au contraire, ils ont compris que cela pouvait aussi être un moyen de créer de l’émulation dans l’équipe.
Comment se déroule ton projet de mini-transat ?
J’ai décidé d’étaler ce projet sur 3 ans pour me permettre de travailler en même temps et de réunir les 80 000€ de budget nécessaire. Cela me permet également de participer aux différentes courses du processus de qualification : 1500 miles doivent être parcourus lors des courses de qualification, et 1000 miles hors-courses (en autonomie) avant le départ.
J’ai acheté mon bateau en septembre 2022 avec l’objectif de prendre le départ de la course en septembre 2025. J’ai déjà fait quelques courses de qualifications, et ma qualification hors-course cette année sur mon bateau.
C’est un projet qui est prenant : je prends des congés pour réaliser les courses. Un week-end sur deux je vais dans un centre d’entrainement à La Turballe. L’autre week-end je travaille sur mon bateau ou je fais des régates sur place.
Il y a beaucoup à faire et à apprendre : sur l’aspect navigation (tactique, stratégie, alimentation, sommeil), mais aussi chantier (stratification, réparation, entretien), créer une association, gérer un budget, assurer sa communication, suivre un planning et les deadlines pour les courses…
Est-ce que tout se déroule comme tu l’avais envisagé ?
Non, pas vraiment !
Cette année, lors d’une régate, j’ai eu une collision avec un autre bateau. Mon bateau a été endommagé. Heureusement, toute ma bande de copains m’a aidé a réparé le bateau.
Et cet été, j’avais programmé de faire ma qualification hors-course de 1000 miles en solitaire. Malheureusement, j’ai dû m’abriter sur les côtes irlandaises en raison d’une tempête, j’aurai donc un petit rattrapage à faire.
Même si c’est une course en solitaire, on n’y arriverait pas si on était seul : on s’aide avec les autres skippers mais aussi avec les collègues de travail, la famille les amis !
Quelles sont les prochaines étapes ?
Là, je poursuis les entraînements jusqu’à décembre, puis je travaillerai cet hiver sur le bateau notamment sur toute la partie électricité. En parallèle, je poursuis ma recherche de sponsors. A partir d’avril, ce sera la reprise des qualifications.
J’ai également un projet qui me tient à cœur : celui d’utiliser cette aventure pour parler des femmes dans le secteur maritime. Nous sommes peu nombreuses, pas assez. Je veux dire aux femmes et jeunes filles que travailler dans le nautisme pour une femme c’est possible, que les études d’ingénieur sont aussi un super parcours pour les filles, que la course au large nous est ouverte !
J’ai eu l’opportunité de rejoindre un équipage 100% féminin en J80 (WLS Trophy). Cela m’a permis de me rassurer sur mes compétences et de me booster pour participer à de plus grandes régates, mais aussi de partager cette expérience avec d’autres femmes qui souhaitaient commencer la voile et n’osaient pas. J’ai envie de faire connaître ces initiatives.
Et après la course, quels sont tes projets ?
Après la mini-transat, je souhaiterai d’abord faire une belle passation sur mon mini. Ensuite, je ne pense pas continuer dans la course au large, le rythme est vraiment très intense, surtout quand on travaille à côté. Par contre, je me vois bien prendre un voilier pour faire une transatlantique ou un tour du monde en équipage : un projet plus collectif, de découverte et de partage, avec des escales, en mode croisière !
Suivez et soutenez Pauline dans son projet de mini-transat :
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