ENSTA Bretagne : Formation des médecins réanimateurs : étudier et prendre en compte les biais de genre

Formation des médecins réanimateurs : étudier et prendre en compte les biais de genre

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Depuis janvier 2022, Cécile Plaud, enseignante chercheure en sciences humaines et sociales à l’ENSTA Bretagne s’intéresse aux parcours des internes en médecine de la spécialité « Médecine Intensive - Réanimation » (MIR). Ce projet de recherche vise à analyser la perception de cette spécialité par les internes et l’évolution de cette perception au cours de leur parcours hospitalier, notamment au prisme des rapports sociaux de sexe.

Une forte féminisation du métier de médecin… dans certaines spécialités

Le nombre de femmes médecin est en forte hausse depuis quelques années. Dans les années 80, on comptait 45% de femmes en première année de médecine. Elles sont aujourd’hui 62%. Ce phénomène récent n’abonde pourtant pas toutes les spécialités. La féminisation apparaît majoritairement en gynécologie, pédiatrie plutôt qu’en chirurgie ou réanimation.

Choix éclairé ou biais de genre ?

Des travaux de recherche récents ont mis en exergue l’impact des représentations et valeurs associées à chaque spécialité. Ainsi, certaines sont perçues comme techniques, rationnelles, risquées et donc plutôt masculines. C’est le cas par exemple de la chirurgie ou l’anesthésie. A contrario, la rhumatologie et la pédiatrie sont considérées comme moins risquées, moins contraignantes dans le temps et laissant plus de place au relationnel. Une identité associée au féminin.

Des travaux de recherche focalisés sur la spécialité MIR : Médecine Intensive & Réanimation

En partenariat avec le FEMMIR (Femmes en Médecine Intensive Réanimation), le CeMIR (Collège des enseignants en médecine intensive réanimation) et avec le soutien financier de la Cité du Genre, Cécile Plaud, maître de conférences a lancé une étude. Validée par le Comité d’éthique, elle porte sur les conditions d’études des internes en spécialité MIR choisie par une centaine d’étudiants chaque année.

Le travail de terrain vise à comprendre les vécus et trajectoires de ces internes : quel est leur parcours, leur perception des questions d’égalité… L’enquête intègre un questionnaire anonyme et des entretiens semi-directifs. La collecte de données a débuté en janvier 2022. Ce sont les internes qui démarraient leur spécialité MIR qui ont été interrogés en premier. Les éléments recueillis seront complétés ensuite par une seconde vague pour ceux qui terminent leur internat. Les premiers seront réinterrogés à mi-parcours puis à la fin de leur internat.

Sensibiliser les enseignants dans leurs pratiques

Les 12 et 13 septembre derniers, Cécile Plaud est intervenue dans le cadre du Séminaire pédagogique annuel du CeMIR. Sa conférence portait sur le thème « Qualité de vie des internes : regards croisés. Les apports d’une approche en termes de rapports sociaux de sexe ».

La présentation qui a été bien accueillie visait à sensibiliser les enseignants en médecine au fait que, dans les pratiques de formation, des normes de genre se reproduisent. Les études montrent, par exemple, que les questions posées, les évaluations vont varier selon que l’étudiant est une femme ou un homme et ce indépendamment du genre de l’enseignant.  

C’est en parlant de ces sujets que l’on crée des prises de conscience et que des évolutions sont possibles.

Suite à cette intervention, Cécile Plaud a été contactée pour animer en avril prochain une formation auprès des enseignants médecins réanimateurs sur les biais implicites de genre.  

Médecine et ingénierie, des similitudes ?

Les travaux de recherche de Cécile Plaud s’inscrivent dans les activités du laboratoire « Formation et Apprentissages Professionnels » dont les travaux portent sur les parcours de formation, de professionnalisation et les dynamiques identitaires, notamment dans le domaine de l’ingénierie.

Au terme de cette étude, Cécile Plaud envisage de mettre en perspective les parcours des internes en MIR avec ceux des élèves-ingénieurs. Là encore, on constate des différences dans les choix de filières : les étudiantes sont fortement présentes dans les études d’ingénieurs spécialisés en biologie ou chimie, quand les étudiants préfèrent les filières de la mécanique ou du numérique.