

Pourriez-vous vous présenter ?
Je suis actuellement doctorant en relations internationales en co-tutelle entre Curtin University en Australie et l’ENSTA Bretagne (département sciences humaines et sociales). Shannon Ford et Klara Kövesi co-encadrent mes travaux. Avant cela, j’ai réalisé un Master en relations internationales et un Bachelor en philosophie.
Sur quel sujet porte votre thèse ? Quelle en est la problématique ?
Le sujet principal de ma thèse est l’impact des entreprises de la Tech sur la législation du cyberespace.
Pour le moment, Il n'existe pas de législation internationale dans ce domaine dont les enjeux touchent à des questions de défense et de sécurité. Même si quelques normes internationales existent, tel que le référentiel Common Criteria ou la législation européenne sur la protection des infrastructures critiques, chaque pays a ses propres règles ce qui laisse des portes ouvertes pouvant profiter par exemple à la cybercriminalité.
Dans nos sociétés dépendantes des technologies numériques, la menace cyber est réelle et forte. Le développement de technologies offensives cyber ou leur dissémination, les cyberattaques devraient – comme c’est le cas pour le nucléaire, civil et militaire – être encadrées par des mécanismes internationaux de régulation. Ces derniers jouent un rôle majeur de prévention et d’évitement des principaux risques, pour juguler des activités cybercriminelles toujours plus virulentes, ou limiter le danger d’une escalade incontrôlable des tensions entre États pouvant mener à l'équivalent d'un Pearl Harbor numérique.
Depuis 20 ans, il y a déjà eu de nombreuses initiatives pour essayer de faire émerger un droit international du cyberespace, mais aucun consensus n’émerge, faute de normes communes et de données partagées. Certaines de ces initiatives étaient portées par des entreprises, ce qui m’intéresse c’est de comprendre pourquoi des acteurs privés interviennent dans ces débats entre gouvernements, et quelle est leur influence réelle.
Comment s’organise votre travail de recherche ?
L’une des raisons de ma présence en Europe est de réaliser des entretiens physiques ou virtuels avec des décideurs européens du cyberespace (organisations publiques et privées).
Mon travail de recherche consiste ensuite à croiser différents points de vus en appliquant la « Grounded Theory » au niveau méthodologique permettant de ne pas se focaliser uniquement sur les données initiales – un entretien par exemple – mais de croiser ces informations avec celles données par d’autres acteurs du domaine.
Combien d’entretiens souhaitez-vous réaliser ?
Une trentaine d’entretiens j’espère, mais le cyberespace représente un sujet très sensible pour les pays, les organisations intergouvernementales et les entreprises. Tous les acteurs ne sont pas toujours prêts à témoigner.
Quel est le principal défi de cette thèse ?
Le principal défi est d'accéder aux personnes impliquées dans ces processus, et de récolter un maximum de données fiables. Cela permettra de parvenir à une meilleure compréhension de la manière dont les différents acteurs sont impliqués dans le processus normatif et réglementaire international, comment ils prennent des décisions et défendent leurs positions. Cette connaissance empirique donnera ainsi aux futurs chercheurs les outils nécessaires pour avancer sur ce sujet complexe de la législation internationale du cyberespace.
Michael poursuit ses recherches en France jusqu’au mois d’août 2023. Puis, en septembre, il rejoindra l’Australie pour finaliser ses travaux et rédiger son mémoire de thèse.